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Désirs d'Avenir des Vals de Saintonge

Blog de soutien à Ségolène ROYAL, Présidente de la région Poitou-Charentes.

« Tous les Français n’habitent pas à l’adresse indiquée. »

Publié le 7 Avril 2012 par Daniel GIAT in Najat

 

Par Najat Vallaud Belkacem

En réaction à la lettre de Nicolas Sarkozy au peuple français, mais aussi à l’occasion de la série de déplacements de François Hollande dans des quartiers populaires de toute la France, ce matin à la rencontre des habitants de Vaulx-en-Velin dans le Rhône, mais aussi à Creil, Aulnay-sous-Bois, Clichy-sous-Bois, Aubervilliers et Les Ulis, je publie une tribune pour libération.fr sur le sujet, en voici le texte:

« Les habitants des quartiers délaissés en périphérie des grandes agglomérations urbaines, plus communément appelés «banlieues» ou «zones sensibles», qui sont aussi pour une immense majorité d’entre eux des citoyens français ne font visiblement pas partie des destinataires de la lettre de Nicolas Sarkozy.

Il se trouve pourtant que dans ces quartiers, encore desservis par la Poste malgré l’état des boîtes aux lettres, le taux de chômage est plus de deux fois supérieur à la moyenne, que le chômage des jeunes dépasse 40%, et que le pourcentage des ménages pauvres est deux fois plus élevé qu’ailleurs, ainsi que le taux d’illettrisme.

Il se trouve aussi que le niveau d’insécurité dans ces quartiers est plus important que sur le reste du territoire avec, par exemple, un taux d’atteintes aux personnes supérieur de près de 6% par rapport à l’ensemble des zones urbaines en France, et qu’il y a deux fois moins de médecins, à titre de comparaison, en Seine-Saint-Denis que dans l’Hérault.

Il n’y a pas de fatalité à cela: depuis 5 ans, la politique de la ville a été le parent pauvre de la politique du gouvernement avec un budget divisé par deux depuis 2008, strictement aucune réforme des politiques publiques prioritaires par la redéfinition des périmètres territoriaux, et le désengagement massif de l’Etat auprès des associations d’éducation populaire de proximité.

Il n’y a pas de fatalité non plus, à ce qu’au terme d’un mandat présidentiel, on semble avoir renoncé à une part du peuple français, à une part du territoire national et aux valeurs de cohésion sociale, d’unité nationale et de solidarité territoriale : cette part de la France d’aujourd’hui a bien compris qu’elle n’avait rien à attendre du Président sortant depuis le «Kärcher», depuis Villiers-Le-Bel en 2007 et Grenoble à l’été 2010, depuis le débat sur l’identité nationale et la stigmatisation des populations d’origines étrangères, des jeunes de banlieues, et des assistés…  Chacun a pris la mesure de ce qui a été abandonné, gâché, dilapidé comme part de notre capacité collective à affronter l’avenir.

Et Nicolas Sarkozy qui ose écrire aux Français, à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, que «c’est en donnant uniquement des droits aux uns et exclusivement des devoirs aux autres, que l’on dresse les Français les uns contre les autres. C’est en justifiant la délinquance par la pauvreté et les difficultés de l’intégration que l’on crée des amalgames entre pauvreté, immigration et délinquance» ? Le tout, avant d’écrire quelques lignes plus bas, qu’«un enfant qui vient d’arriver sur le territoire a besoin de beaucoup plus d’attention de la part de ses maîtres qu’un enfant d’une famille installée depuis longtemps en France». et que pour y faire face… «Il faut réduire de moitié les flux actuels d’immigration dans notre pays.»

C’est une honte !

Crise économique, crise sociale, crise sociétale : notre pays doit en effet se redresser après avoir été ébranlé par les dérèglements mondiaux et par une politique qui s’est révélée aussi injuste qu’inefficace. Et pourtant, un défi semble s’imposer parmi tous les autres pour retrouver un élan national à la hauteur du défi qui est devant nous, c’est la lutte contre les inégalités: inégalités sociales, inégalité dans la recherche d’emploi, inégalité dans l’accès au logement, inégalité face aux soins… des inégalités toujours plus intenses qui se sont incroyablement creusées durant le dernier quinquennat.

Quand comprendra-t-il, lui et sa famille politique, qu’il ne s’agit pas de commisération, de compassion, de charité ou d’assistanat mais d’un investissement nécessaire en direction de la population la plus jeune, la plus dynamique, la plus capable de travailler à la construction de l’avenir de la France ? Il y a dans les banlieues un formidable capital humain inexploité, inexploré, rejeté et stigmatisé par un gouvernement qui n’a pas compris, qui n’a pas aimé pas ces territoires, et qui, sans aucun doute, n’a pas pris la mesure de ce qu’est la France du 21e siècle.

C’est la raison pour laquelle après dix années d’une politique de mépris à l’égard des banlieues et de ses habitants, il est grand temps d’entrer dans une nouvelle ère fondée sur le dialogue, le respect, la considération, autrement dit, les principes élémentaires de l’unité républicaine. La République doit être partout, et pour tous, équilibrée, juste et équitable. Il faut y rétablir le premier des droits, la sécurité avec le retour de la police de proximité dont la suppression fut une faute grave de Nicolas Sarkozy.

Aucune politique ne peut être envisagée si elle ne s’inscrit pas dans un projet ambitieux pour notre jeunesse des quartiers. Et c’est pourquoi il sera déterminant d’engager en priorité la réforme de l’éducation nationale. Nous savons que là où l’école publique s’est dégradée, la république s’est retirée. Nous connaissons le quotidien de ces professeurs insuffisamment formés, confrontés à ces missions qu’ils ne sont pas en mesure d’assumer et qui sont in fine contraints d’abdiquer. Nous devons prendre la mesure de ces parents menacés de sécession sociale et qui font tout leur possible pour éduquer dignement leurs enfants. François Hollande a fait le choix courageux de concentrer en priorité les 60 000 postes dans l’éducation nationale sur les écoles des quartiers populaires. C’est là que les besoins sont les plus sensibles, c’est là que l’aspiration à l’égalité est la plus forte. Le renforcement de l’Ecole de la République est la condition de l’égalité. Mais il s’agit également de soutenir ces parents avec toute notre détermination, et c’est pourquoi un réseau d’entraide aux parents isolés devra être introduit et qu’une école à cet effet leur sera consacrée.

La seconde priorité est l’emploi. Il n’y a pas de reconnaissance sociale, pas davantage d’épanouissement individuel, ni d’élévation collective s’il n’y a pas d’emploi. Nicolas Sarkozy voit dans le chômage massif de ces quartiers une concentration d’assistés: nous y voyons un réservoir de talents qui ne demandent qu’à s’exprimer. L’urgence est de les raccompagner vers l’emploi sous toutes ses formes, et les 150 000 emplois d’avenir sont prévus pour ça. Il faudra que les tempéraments les plus ambitieux puissent être suffisamment appuyés c’est ainsi qu’une filiale de la banque publique d’investissement sera mobilisée au soutien de leurs initiatives. Il s’agira enfin, et c’est la moindre des choses, de permettre aux femmes et aux hommes de ces territoires, en quête de travail, de participer à la modernisation de leurs quartiers. Ils devront être pleinement associés et même embauchés dans les projets que l’Etat et les collectivités territoriales viendront entreprendre. François Hollande exigera que soit ajoutée au sein des contrats publics destinés à une activité dans les quartiers populaires, une clause d’insertion qui permette à leurs habitants d’en être les premiers bénéficiaires.

L’ultime défi, c’est la lutte contre les discriminations. Il n’est plus tolérable, qu’en fonction des origines, de la religion, du lieu de vie, des millions de Françaises et de Français soient toujours victimes de cette forme d’injustice particulièrement odieuse. Tout doit être mis en œuvre pour que la société des préjugés recule au profit de celle de l’égalité.

La mixité sociale reste la meilleure réponse pour faire face à ce processus de ghettoïsation en cours d’accélération. François Hollande a pris un engagement clair en faveur de la mixité dans le logement en proposant une réforme de la loi Solidarité et Responsabilité Urbaine qui prévoit de rehausser de 20 à 25% l’objectif de logements sociaux, avec des sanctions multipliées par cinq lorsque la loi de la République ne sera pas respectée par les communes.

François Hollande souhaite poser un nouvel acte en faveur des banlieues. Elles ne peuvent plus être le lieu du ban, le lieu de la désespérance, le lieu où toutes les inégalités sont autorisées. Cela exigera des moyens ; nous avons pris la décision d’y consacrer nos efforts, guidés que nous sommes, par nos convictions les plus profondes. Donner plus à ceux qui ont moins, tel sera toujours la mission et la fierté des socialistes, mais aussi des Républicains sincères, comme de tous les progressistes honnêtes. »

Source:http://www.najat-vallaud-belkacem.com/

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